Happycratie, non merci !

A écouter tous les experts de la psychologie positive, le bonheur serait une donnée fiable, qui se construit, s’enseigne et s’apprend. Il suffirait d’appliquer certaines techniques pour que le bonheur soit une évidence et à portée de main.

Mais est-ce vraiment aussi simple ? Cette dictature du bonheur qui envahit tous les magazines ou les livres feel good ne serait-elle pas en fait pernicieuse et pas aussi bénéfique qu’il n’y parait ?

La première question que nous sommes en droit de nous poser est : mais qui tient finalement les reines de cette dictature (car oui, il s’agit bien d’une dictature) ?

Au même titre que les lobbyings contrôlent notre alimentation et notre santé, l’industrie du bonheur fait vendre.

Si tu n’es pas heureux, t’es pas « in », tendance et dans la normalité.
Mais la nature humaine n’est-elle pas plus complexe qu’on aimerait nous le faire croire ?

Personnellement, je me suis aperçue des travers de l’happycratie au sein même de ma vie. Quand tu gravites au quotidien dans un univers lié au bien-être, tout le monde t’imagine super heureuse et épanouie. Alors, même si c’est le cas la plupart du temps, lors des moments de doute, de remise en question voire même de névrose, tu te sens obligée de donner aux autres ce qu’ils veulent voir. Alors sans même t’en rendre compte, tu commences à jouer un rôle, celui de la nana à qui tout souri et réussi. Lorsque l’on te demande machinalement « comment ça va ? », tu réponds en te concentrant pour avoir l’attitude de la meuf qui va super bien même dans les moments où tu as juste envie d’hurler « ça va super mal et alors ? »….
Mais le pire c’est avec ses amis… On a peur de le dire qu’on est en plein marasme émotionnel, qu’on a l’impression d’avoir raté sa vie (même si c’est pas vrai !), qu’on vit un vraie révolution intérieure… de peur de passer pour la névrosée à fuir sans plus tarder.
Bref, qu’on se le dise, la névrose ne fait plus vendre… et effraie. Il faut sourire, être parfaite et aller toujours bien. Et personnellement, j’ai l’impression de m’être un peu perdue dans ce tsunami de la dictature du bonheur.

Alors aujourd’hui, je revendique le droit à la tristesse, à la déprime passagère, aux coups de blues, de flip, d’immersion en eaux troubles, de « pétages de plomb » en bonne et due forme. Car ces moments sont indispensables pour se construire, se connaître et rebondir de plus bel.
je veux montrer mon vraie visage aux gens que j’aime, sans triche, ni fard… Et que ceux qui m’aime ne me juge pas…

Cela me fait penser aux films de Peter Weir, The Truman show avec « l’excellentissime » Jim Carrey. Briser les chaines d’un monde virtuelle et fake, ou l’apparent bonheur laisse soudainement place à une réalité certes bien plus sombre mais oh combien plus subtile et passionnante…

A lire absolument : Happycratie d’Eva Illouz & Edgar Cabanas aux éditions Premier Parallèle – 21 €


Et vous, que pensez-vous de cette dictature du bonheur ?

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