Le jour où je suis devenue bigorexique…
Pendant très longtemps j’ai pensé que j’étais nulle de chez nulle en sport. Je ne faisais pas que le penser, je l’étais vraiment.
Mes parents n’en faisaient pas et je n’avais aucun référent en la matière dans mon entourage pour me donner la petite étincelle et surtout pour croire sportivement en moi. Alors, des années durant je suis restée nulle et pleinement convaincue de l’être.
A l’école je détestais faire du sport car le gymnase était bien souvent le théâtre de moqueries en tout genre. Je me rappelle du jour où après avoir tenté de faire une roue sur la poutre, je me suis littéralement vautrée et … cassée le nez. Direction les urgences… Pendant plusieurs jours je gardais sur mon nez les stigmates d’une maladresse sportive des plus affligeante. De quoi accroître encore un peu plus mon aversion pour le sport.
Je détestais courir… surtout autour d’un stade. Je me rappelle avoir couru 500 m lors d’une épreuve en primaire et j’avais l’impression d’avoir réalisé un exploit (de ouf !). Mais plus que tout au monde, je détestais le saut de hais. Je me sentais littéralement paralysée (et très très bête) devant ces petits obstacles… insurmontables pour moi.
Le seul sport qui me plaisait était la natation (hormis les vestiaires et la sensation hyper désagréable des cheveux mouillés sur mon pull en laine). J’aimais nager sous l’eau, m’imaginer une vie subaquatique et sentir mon corps en parfaite communion avec l’eau. Je me sentais libre et dans mon élément.
Les années passèrent et au fond de moi l’envie de m’accomplir sportivement grandissait (lentement mais sûrement). J’appréhendais de franchir le cap, tellement j’avais cette peur viscérale du regard des autres.
Mais j’étais secrètement convaincue que j’avais en moi le mental suffisant pour aller loin (en tout cas là où je n’avais encore jamais réussi à aller).
Plus le temps passait, plus le fantasme grandissait : me surprendre, dépasser mes limites et susciter le respect des autres sportifs.
Au fil des années, je me suis mise au sport mais les interruptions étaient fréquentes et la motivation irrégulière.
Jusqu’au jour, il y a 5 ans, où j’ai trouvé le club de mes rêves. J’ai alors commencé à faire de plus en plus de sport. Il m’en fallait toujours plus et surtout goûter enfin à toutes ces disciplines pour lesquelles je n’avais jamais osé franchir le cap. A partir de ce moment précis j’ai commencé à faire 5 heures, puis 8 heures, puis 10 puis 12 heures… Il m’en fallait toujours plus et ce pour plusieurs raisons :
1. Avoir ma dose quotidienne d’endorphines,
2. Me permettre de me vider la tête en décrochant du mental,
3. Repousser sans cesse mes limites,
4. Etre enfin respectée en tant que sportive, voir redoutée (et ça je dois bien avouer que c’est le gros kiff !),
5. M’apaiser tout simplement.
En préparant il y a peu un papier sur les addictions, j’ai découvert le mot de bigorexie et, aussi blonde que je suis, il ne m’a pas fallu longtemps pour comprendre que j’en avais tous les symptômes :
- faire du sport tous les jours, été comme hiver,
- se sentir mal en ne faisant aucun sport de la journée,
- organiser sa journée en fonction de ses séances d’entraînement,
- avoir constamment l’impression de ne pas en faire assez,
- être capable de refuser un we ou un déplacement pour ne pas rater un cours de sport,
- Diversifier de plus en plus ses activités sportives,
- vouloir faire du sport malgré les blessures…
Parmi mes sports de prédilection : la boxe anglaise, le yoga vinyasa, le cross fit, l’aqua palming, la danse et le running. Courir est loin d’être toujours une partie de plaisir mais cela me permet d’être encore plus endurante dans les autres disciplines que je pratique. En boxe par exemple, je prends plaisir à voir certains de mes partenaires de jeu sortir l’artillerie lourde dans les premières secondes, puis s’épuiser très vite par manque d’endurance (car oui messieurs, la muscu c’est bien mais l’endurance c’est bien mieux).
Mais revenons à la bigorexie… J’ai lu dans la presse que les raisons de cette addiction au sport pouvaient être l’obsession de devenir mince (pas faux), la nécessité de combler un vide affectif (je n’ai pas l’impression), la présence d’une faille narcissique (va savoir !), la volonté de repousser ses limites (c’est vrai) ou encore d’avoir une meilleure estime de soi (pas faux).
Depuis que j’ai découvert ce mot, je n’arrête pas de lire dans la presse combien la bigorexie est dangereuse… Elle a d’ailleurs été reconnue comme maladie par l’Organisation Mondiale de la Santé.
Alors, est-ce grave docteur d’être bigorexique ? Personnellement je n’ai vraiment pas l’impression. Bon je sais bien que l’équilibre est dans le juste milieu mais j’ai l’impression que je n’ai jamais autant été aussi bien et apaisée. De toutes les addictions que j’ai pu rencontrées, la bigorexie me semble de loin la plus saine…
Ma passion pour le sport est peut-être une addiction mais je sais combien elle est indispensable à ma vie et mon bien-être.. Alors je suis sûrement bigorexique mais qu’importe.. La bigorexie me va si bien !
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